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07 Aug
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Le 24 juillet dernier, les Alpes françaises ont été choisies pour organiser les Jeux Olympiques d’hiver 2030. Interrogés depuis plusieurs mois sur notre positionnement, nous sommes restés fidèles à notre ligne de conduite : ne pas rajouter du bruit au bruit et se concentrer sur les dossiers locaux sur lesquels, par notre présence, nous pouvons agir.


©CNOSF

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Ceci ne signifie pas que nous n’ayons pas un point de vue. Nous n’avons jamais été très fans des Jeux Olympiques d’hiver dans les Alpes. D’abord parce que l'urgence du réchauffement climatique, tout particulièrement en Haute-Savoie, invite à repenser notre rapport à la montagne et sa mutation progressive vers un usage plus sobre et plus écologique. Ensuite parce que, contrairement à d’autres territoires, la Haute Savoie n’a pas besoin de boosteur économique et touristique. 

Une fierté pour les acteurs touristiques et sportifs ?

Jamais les stations, les professionnels de la montagne, les élus locaux ou les instances sportives locales n’ont été associés à ce projet. Plus aucune station ne prône le tout ski et surtout pas dans les Aravis, où les traditions locales et le tourisme vert sont depuis des années à l’honneur. Le problème de la candidature des Alpes Françaises est d’abord que c’est une candidature politique, voulue par les seuls MM. Wauquiez et Muselier. Sans appuis locaux, sans réel projet... il aura fallu que tous les autres “concurrents” à l’organisation de cette olympiade se retirent ! Une faiblesse des candidatures aux JO d’hiver qui doit inviter le CIO à revoir son modèle.

L'avantage d'organiser les Jeux Olympiques est généralement qu’ils laissent “un héritage”, notamment en terme d'infrastructure. Cette candidature à la “va-vite” a au moins l’avantage, il faut le souligner, de réutiliser de nombreuses infrastructures existantes. Mise à part une ou deux patinoires en Région marseillaise ou niçoise, tout existe déjà. On peut dès lors garder un espoir pour que cet évènement ne soit pas un appel de plus à bétonner nos montagnes.

Un héritage à espérer ?

S'il y avait un héritage à espérer, ce seraient des améliorations et des investissements sur les transports dont on sait que c’est un désastre écologique au moment des JO. Néanmoins, nous risquons fort d’être déçus pour ce qui concerne la desserte des Aravis depuis Annecy. Ces JO sont dans 5 ans et demi. Or, rien n’a été pensé, rien n’est prêt pour lancer un chantier de transport collectif (lequel? Bus, tram, cable?) efficace et pérenne entre Annecy et la Clusaz/Le Grand Bornand. Le délai est bien trop court et là encore non-anticipé. Nous allons pousser, pour demander les investissements attendus en terme de mobilité, comme la jonction avec Aix-les-Bains et préserver les annéciennes et annéciens d'en assumer à la fois le poids financier et environnemental. Les chances d’aboutir à un tel équipement, qui serait pourtant un héritage bienvenu (et donc pour nous synonyme d’une candidature “réussie” pour le territoire), sont très très minces en 5 ans…

Le second point d’héritage qui est pour nous le plus inquiétant, le plus angoissant, est celui de l’image de nos montagnes. Malgré les dérives récentes que l'on a tous pu observer, depuis des années, on ne le souligne pas assez, les professionnels de la montagne d’hiver et les stations ont entamé leur mue. Ce fut long mais c’est aujourd’hui une dynamique bien ancrée, qu'il faut continuer à encourager et accompagner, même si elle demande du temps. Il s’agit de muter, de diversifier l’offre, de s’adapter aux changements climatiques sans pour autant sortir du ski, de la neige et des loisirs d’hiver. En témoigne par exemple, le lancement il y a 2 ans du Grand [la]BO au Grand Bornand en association avec les universitaires pour penser la “montagne de demain”. Loin des injonctions d’écologie punitive demandant l'arrêt de tout, tout de suite, les professionnels de la montagne ne sont pas insensibles aux questions environnementales en montagne - leur outil de travail - et agissent pour muter.


Crédits : Commune du Grand-Bornand / USMB (conception par Arthur Hawkins, collectif de la Guilde de l'Innovation)


Le risque de ces JO 2030, alors que l’on connaît le conservatisme du CIO pour les JO d’hiver (visiblement c'est moins vrai pour ceux d’été), c’est qu’il ne s’appuie pas sur ces mutations, mais qu’il entraîne leur mise en sommeil pour poursuivre et promouvoir un modèle du “tout ski” : canons à neige, neige transportée, glace artificielle, etc… l'appétence d’un Wauquiez est connue pour le subventionnement aux canons à neige par exemple.  Voilà une pratique à faire cesser.

Cette candidature des Alpes françaises dans 5 ans et demi va promouvoir la montagne d’avant. En total décalage avec les prises de conscience et les actions en cours, elle va orienter les énergies, l’argent public et le temps sur un retour en arrière vers un modèle promu par le CIO qui est dépassé et contesté y compris par les acteurs du tourisme eux mêmes. Le risque est alors immense non seulement de stopper une dynamique plus vertueuse déjà engagée, mais surtout d’en anéantir les efforts faits jusque-là y compris en matière d’image.

Du bruit pour rien ?

Ces Jeux Olympiques 2030, pour le dire rapidement, seront des jeux au rabais car voulus dans des bureaux lyonnais et marseillais sans les territoires... Leur héritage sera vraisemblablement inexistant mais leurs impacts bien réels, en l'absence de vision sur le transport des visiteurs notamment mais aussi et surtout en termes d'image et d'impact climatique en promouvant un modèle dépassé.

Comme beaucoup, nous avons le sentiment de devoir subir ces JO qui d’ailleurs n’emportent pas une adhésion flagrante. Il est temps que le CIO change de modèle mais ça, nous n’y pouvons rien. Nous ne pouvons que saluer les initiatives apolitiques qui s'opposent à ces jeux olympiques et par leurs actions, ont déjà permis d'intervenir comme lanceur d'alerte. Des actions qui ont un impact direct lorsqu’elles révèlent des pratiques illégales.

Les JO auront lieu en 2030 chez nous qu’on le veuille ou non. En tant que groupe élu à la municipalité d'Annecy et l'agglomération du Grand Annecy, notre priorité sera de les rendre les plus “discrets” possibles à défaut d’une hypothétique avancée sur les mobilités. Nous refusons la démagogie qui voudrait lever les foules pour un objectif certes louable mais dépassant largement le mandat qui nous a été confié. La concertation, c'est au CIO, au Comité National Olympique et Sportif Français, au Ministère des Sport et des Jeux Olympiques et Paralympiques (!) et au Conseil Régional de la mener. Dès lors, nous prenons acte et nous rendons disponible pour préparer au mieux la venue de cet évènement, en limiter les impacts néfastes et obtenir les compensations nécessaires. Pour le reste, les électeurs jugeront ceux qui nous imposent cela sans aucune demande ni du monde de la montagne ni de nos territoires et de leurs populations, en 2028, lors des prochaines élections régionales.

La prise de position de François Astorg suite à notre intervention

Pour limiter son empreinte, notre priorité sera d'obtenir les investissements en matière de mobilité localement, dans le souhait qu’ils prennent le moins d’énergie et de financements aux acteurs et aux politiques de notre territoire. C’est un mauvais moment à passer. Pourvu que les stations, mais nous avons confiance, en fassent le minimum et poursuivent leurs trajectoires vers une mutation nécessaire, progressive et raisonnée (y compris en termes d’emplois) vers un modèle plus respectueux des habitants et de la nature.

Les élus Les Annéciens
 

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